Sortie de nouvel album Nos Enchanteurs.eu, le par fr.
Mis en ligne dans le kiosque le 14 juin 2014.

Renaud passe au vert

On ne va pas tricher, faire semblant, en tous cas pas entre nous. Renaud chante faux, faux comme c'est pas possible. C'est tellement dissonant que c'en est rare. Mais ça on le sait, on l'a toujours su. Ça a simplement empiré cause sans doute à tous les excès possibles... Les fans recevront cette voix comme d'autres bouffent des hosties : religieusement. Les autres rechigneront, fuiront même...

Mon propos est ailleurs. Voici donc un nouvel hors-série de Renaud, un hors collection, hors production courante, hors tout-venant. Jadis, il nous avait fait le coup des chansons réalistes, de Bruant, Montéhus et autres du même tonneau. Puis celui des chansons du Nord de la France, à l'époque de son Germinal, bien avant Bienvenue chez les Ch'tis. Il nous a fait aussi Brassens, opus qui ne valait que par la ferveur et la passion qu'il voue au chanteur à la pipe, pas plus. Voici que, en cohérence avec ce qu'il est, avec ce qu'il a toujours été, Renaud nous fait ce disque de reprises et d'adaptations de chansons irlandaises. L'expression « Renaud prend l'Eire » fera florès... Reste que c'est plus le versant social et politique des vertes Irlandes que Renaud explore ainsi, la joie de vivre de ce peuple rebelle, insoumis. Le chanteur énervant rêvait, depuis son premier voyage à Belfast, d'adapter les plus belles ballades trad' des Chieftains, Dubliners et autres Fureys. C'est fait, qui plus est avec des musiciens irlandais ce qui est, convenons-en, la moindre des choses. Chômage et crise sociale alimentent donc ce nouvel opus, au moins autant que l'amour et l'amitié. Ça n'en fait pas pour autant un album engagé. De Romain Dudeck (Poésie des usines) à Bernard Lavilliers (Les mains d'or) tant de chanteurs chantent aujourd'hui ces outils saccagés par les patrons voyous que c'en est presque ritournelles, redites. Reste qu'on est loin de la vision folkloriste des vertes contrées d'Irlande, que les pas de danse ne masquent pas les ouvriers mis à pied et que, Dublin et Londonderry ou pas, c'est de notre société dont parlent ces chansons.

Lassé des bobos, Renaud aurait pu nous renaître en porte-voix des laissés pour compte, d'Irlande et d'ailleurs. Difficile avec cette voix-là...

Renaud, Molly Malone, 2009 Virgin.

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