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Mis en ligne dans le kiosque le 7 avril 2006.

Colombie : Ingrid Betancourt, Renaud et les Américains

Les médias diffusent de nombreux reportages sur l'ex-candidate à la présidence de la Colombie, Betancourt. La chanson «Dans la jungle», du chanteur Renaud, progresse au hit-parade.

Le conflit en Colombie

En Colombie sévit un grave conflit social, politique et militaire. L'Etat colombien, soutenu par les multinationales, les propriétaires fonciers, les industriels et leurs représentants politiques, mène une politique criminelle envers le peuple. Il y a plus de 40 ans que les FARC ont fait leur apparition dans les campagnes, comme un bras du mouvement paysan meurtri par la répression.

Les FARC veulent une réforme sociale très profonde et l'ouverture d'un espace démocratique dans le pays. explique Maurice Lemoine, rédacteur en chef adjoint du Monde diplomatique et spécialiste de l'Amérique Latine.1

Le président colombien Alvaro Uribe Vélez représente l'option de Washington, qui vise à une défaite militaire du mouvement révolutionnaire. Même avec les conseillers militaires étasuniens, les exercices militaires conjoints et des livraisons d'armes considérables, l'armée colombienne n'est pas à même de réaliser cet objectif. Il reste l'internationalisation du conflit, y compris l'intervention massive de troupes américaines. Entre-temps, l'État colombien discrédite la guérilla en la traitant de «bande terroriste» et, bien sûr, ne souhaite pas négocier avec elle.

Détention d'Ingrid Betancourt

Ingrid Betancourt est entrée en février 2002 dans une zone servant depuis une année aux négociations entre le gouvernement et la guérilla. À ce moment-là, la tension était grande puisque le gouvernement avait suspendu les négociations et s'apprêtait à bombarder la région où se trouvaient les chefs des FARC. Pour cette raison, l'armée populaire avait ordonné la fermeture de l'accès à la zone. Ingrid Betancourt, pourtant au courant de la gravité de la situation, a voulu se rendre sur place et forcer les barrages, mais elle a échoué et a fini par être prise. Son garde du corps, par la suite, a expliqué que Betancourt lui avait demandé de se déguiser en paysan, ce qu'il avait refusé. Pour quelle raison Ingrid Betancourt n'a-t-elle pas été libérée par la suite ?

Échange humanitaire

En Colombie, il y a de nombreux révolutionnaires en prison, souvent malades ou invalides de guerre. Les FARC souhaitent un échange humanitaire de prisonniers. C'est pourquoi, depuis des années, elles retiennent par la force des militaires, des policiers et des politiciens et demandent de les échanger avec leurs camarades qui sont en prison. Les prisonniers des FARC sont traités de façon humaine et partagent les conditions de vie des guérilleros; ils ne sont donc pas ligotés et bâillonnés comme l'imagine Renaud, influencé peut-être par les films anticommunistes américains. Soit.

Le gouvernement colombien prône la libération par la force des prisonniers, ce qui, dans les faits, ferait de nombreuses victimes parmi eux. La mère d'Ingrid Betancourt déclare en ce début de 2006 : Nous conjurons le Gouvernement colombien de ne pas tenter de sauvetage 'à feu et à sang'; les séquestrés ont droit à la vie et la vie est le premier droit de toute nation. 2 En fait, l'armée aurait tout intérêt à ce qu'Ingrid Betancourt se fasse tuer entre les mains de la guérilla, explique Maurice Lemoine. Ce serait pour eux un coup politique extraordinaire. Ingrid Betancourt est plus en danger du fait des réactions du gouvernement et de l'armée que du fait de sa détention par les FARC.3

Efforts des Farc pour parvenir à un accord

De nombreuses actions sont entreprises pour demander au gouvernement de procéder à un échange humanitaire. Ainsi le commandant des Farc, Simón Trinidad, était allé en 2004 à Quito, en Équateur pour entrer personnellement en contact avec les représentants de l'ONU et avec l'ex-époux d'Ingrid Betancourt, qui travaillait à l'ambassade de France dans ce pays, afin de relancer la proposition d'échange humanitaire de prisonniers. Malheureusement la CIA, avec le concours des services secrets colombiens et équatoriens, a arrêté Simon Trinidad, qui, quelques mois plus tard, a été extradé vers les États-Unis.

Ensuite, le 13 décembre 2004, le Président Uribe ordonne l'enlèvement, au Venezuela, du négociateur international des FARC, Rodrigo Granda.

Le sabotage du gouvernement colombien

Début 2006 à Paris,4 la famille d'Ingrid Betancourt, a demandé à la communauté internationale, de faire pression sur le gouvernement du Président Alvaro Uribe et sur la guérilla des FARC pour forcer un accord humanitaire qui rende possible la libération des quelque 3.000 séquestrés du pays, qui se trouvent dans tous les camps. Nous demandons à la communauté internationale d'exercer une très forte pression pour que le président colombien, Alvaro Uribe, arrive à un accord avec les FARC afin que tous les otages soient libérés.

Pressions des États-Unis

Dans un récent interview, 5 Astrid Betancourt, la sur d'Ingrid, accuse par ailleurs les États-Unis de s'opposer à un «accord humanitaire» permettant de procéder à un échange de prisonniers de part et d'autre (), qui peut s'appuyer sur le droit international humanitaire ou sur un accord politique.

L'ambassadeur des USA en Colombie répète dans tous les dîners que son pays est contre un accord humanitaire. Il a d'ailleurs osé l'exprimer en privé à ma mère en janvier. Comment voulez-vous dans ces conditions que le gouvernement colombien, qui est complètement tenu économiquement par les États-Unis, puisse véritablement s'engager dans cette voie ?, interroge Astrid Betancourt.

Choisir le chemin de la paix

Il est très important que les citoyens européens ne se laissent pas influencer par la désinformation et la manipulation de certains médias. Soutenir l'échange humanitaire des prisonniers est la meilleure façon de contribuer à la paix en Colombie. Faire le contraire ne reviendrait-il pas à soutenir la politique de Bush et du gouvernement colombien et donc, la poursuite de la guerre ?

1 Maurice Lemoine, rédacteur en chef adjoint du Monde Diplomatique et spécialiste de l'Amérique Latine, in Le Nouvel Observateur, 2002 · 2 www.ingridbetancourt-idf.com/base/article.php3?id_article=74 · 3 Maurice Lemoine, rédacteur en chef adjoint du Monde Diplomatique et spécialiste de l'Amérique Latine, in Le Nouvel Observateur, 2002 ·4 www.rcn.com.co · 5 Idem

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